Lee Ufan : Hors-champs – Laure Adler
- Posted by Béatrice Cotte
- On 12 avril 2016
- Emission Radio
Les œuvres du Sud-Coréen Lee Ufan mêlent avec sobriété matériaux artificiels et naturels. Artiste, philosophe et écrivain, il s’entretient avec Laure Adler pour évoquer son parcours d’artiste et de penseur.
Lorsqu’on énumère ses activités, il réagit : « Je ne suis qu’un artiste, je ne me considère pas comme un philosophe ou un écrivain». Son parcours n’est pourtant pas si uniforme : « j’ai appris à peindre quand j’étais petit, mais (…) j’aimais plutôt la littérature. Quand j’étais collégien et lycéen, j’écrivais des poèmes et des nouvelles. A l’âge de vingt ans, je suis allé vivre au Japon. Et comme je ne parlais pas le japonais, je me suis dit qu’il était impossible de continuer la littérature. Alors j’ai étudié la philosophie à l’université. (…) Puis je me suis rendu compte un jour que j’étais devenu un artiste. »
Cet artiste qui, en 2014, exposait ses œuvres dans le jardin du Château de Versailles, entretient son talent par une grande curiosité sur le monde extérieur. « Dans mon enfance, (…) l’art était toujours une sorte de fantasme pour moi. J’étais (…) très curieux de tout savoir et j’étais sensible à la moindre chose. Même un mégot de cigarette pouvait susciter ma curiosité. J’ai essayé de garder cette sensibilité qui m’a appris beaucoup de choses pendant toute ma vie. »
A choisir, considère-t-il que l’acte de création est plutôt l’expression d’une intériorité ou d’un apprentissage ? Il répond : « Je pense que les deux cas sont possibles. Mais je ne crois pas beaucoup à l’idée de partir de soi-même. (…) Mon travail (…) ne part pas de moi-même mais d’une rencontre. »
Il prend l’exemple de Paul Cézanne qui peignait la montagne Sainte-Victoire située à l’est d’Aix-en-Provence. « Beaucoup de critiques disaient qu’il l’interprétait à sa manière, mais je pense que Cézanne dialoguait avec la Sainte-Victoire ; donc les idées de Cézanne et la Sainte-Victoire se rencontraient sur un cahier de dessin ou sur une toile. »
« La rencontre entre le spectateur et le tableau créé une résonance, et c’est dans cette résonance que se trouvent le spectateur et le tableau. Il ne faut pas regarder le tableau comme un objet. Le spectateur ne doit pas être indifférent. Tant qu’il ressent qu’il y a un va et vient entre le tableau et lui, qu’il y a une résonance et qu’il est confondu avec lui dans le monde, il peut enfin dire qu’il est en train de regarder le tableau et qu’il est avec le monde. Il faut donc dépasser l’idée de regarder un tableau en tant que spectateur. Il faut sentir qu’on est dans le monde. »
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