ART COLOGNE 2016 – 50 ans : invitée d’honneur l’Allemagne ?
- Posted by Béatrice Cotte
- On 15 avril 2016
- cologne, Foire Art contemporain
ART COLOGNE fête cette année ses 50 ans d’existence et conforte sa position de foire « ultra crédible » et de qualité « ultra homogène » sur l’échiquier des foires européennes et internationales. Petit pied de nez à sa consoeur française Art Paris Art Fair, qui se déroulait une semaine auparavant, pas besoin d’invité d’honneur étranger pour s’offrir une identité forte ! Non ART COLOGNE, ne cherche pas l’originalité à tous prix…L’événement s’est construit au départ autour d’acteurs locaux (galeristes et collectionneurs) et a su imposer en un demi-siècle la scène artistique allemande sur le marché de l’art.
En visitant la foire, on ressent une touche « nationaliste » qui s’impose comme une évidence. On ressent une solidité profonde du milieu artistique allemand et la force de cette scène au niveau national et international. On comprend immédiatement ce qui manque trop souvent aux professionnels français pour pouvoir imposer nos artistes en France et à l’étranger : une bonne dose de chauvinisme !
Au total 218 galeries sont présentes cette année (10 de plus que l’année précédente), et bien que la majorité des exposants soient allemands, 24 pays sont représentés sur ART COLOGNE. Si l’année dernière on comptait cinq galeries françaises (Jean Brolly, Laurent Godin, Suzanne Tarasieve, Lahumière et Jeanroch Dard, ce dernier n’ayant pas renouvelé sa participation), cette année on peut observer l’arrivée d’un acteur majeur du marché de l’art avec la présence de la Galerie Perrotin dans le secteur des Galeries internationales.
Malheureusement, le stand de cette galerie « star » manque cruellement de scénographie, d’originalité et de force pour marquer les esprits et réussir son entrée en scène! Jouant les galeries « racoleuses » avec une sculpture de femme nue ultra réaliste placée bien en évidence à l’entrée du stand, la Galerie Perrotin prend le risque de rappeler la scénographie malheureuse de The Kid sur le stand de la Galerie ALB sur Art Paris Art Fair ?
A l’inverse, la proposition très « muséale » de Suzanne Tarasieve, regroupant les artistes Max Beckmann, Jean Bedez, Alkis Boutlis, Otto Dix, Neal Fox, George Grosz, Tim Plamper autour de la Nouvelle Objectivité, se démarque avec intelligence des autres stands. Laurent Godin, met en avant l’artiste belge Peter Buggenhout et Jean Brolly reste fidèle à Bernard Aubertin, qu’il a déjà montré en solo show sur Art Genève…Nouveaux venus au troisième étage, dans la section NEW CONTEMPORIES, les galeries parisiennes Triple V et Samy Abraham présentent une collaboration inédite autour des artistes John Tremblay et Lisa Beck.
Comme l’année dernière (article sur Art Cologne 2015) peu d’artistes français exposés mais quantité d’artistes allemands, véritables « invités d’honneur » de la foire. On ne compte plus, au risque de frôler l’overdose, le nombre d’œuvres de Jonathan Meese ou de Georg Baselitz exposées pour ce cinquantième anniversaire d’ART COLOGNE ! Pour marquer cette édition spéciale, quelques galeries sont sorties des formats standards pour présenter quelques œuvres hors normes comme la galerie viennoise Nächst St. Stephan avec une immense toile de plus de 7 mètres de long de Katharina Grosse. Mais rien de bien tonitruant au demeurant. D’ailleurs pour marquer ses 50 ans, la foire n’a pas fait dans la démesure mais dans le sérieux avec l’édition d’un catalogue retraçant l’histoire de la naissance de la première foire d’art contemporain et de 50 ans de marché de l’art à Cologne, avec une exposition de la collection de son principal sponsor la Deutsche Bank, et avec, plus « original », des tours « naturistes » de la foire organisés par l’artiste australien Stuart Ringholt. On note que même dans cette proposition « décalée » on reste ancré dans une certaine tradition sociale allemande…
Enfin, le Prix Art Cologne 2016 a été remis à un galeriste allemand Raimond Thomas. Le prix récompensant le travail accompli en 50 ans de carrière à la tête de la Galerie Thomas à Munich et le Prix New Position 2016 a également été remis à une galerie allemande Jürgen Becker pour le solo show de l’artiste allemand Gerrit Frohne-Binkmann. Après tous ces coups de projecteurs sur des acteurs nationaux, nul doute que ART COLOGNE sait promouvoir et soutenir plus que toute autre foire au monde sa scène nationale et lui donner une « vitrine » de choix à l’international. Les foires et les galeristes français pourraient peut-être en tirer des leçons ? Certaines galeries françaises, dont les plus grandes, sont tentées d’exposer sur ART COLOGNE mais elles reculent devant le fait qu’elles pensent devoir y exposer des artistes allemands pour s’y retrouver financièrement. Certes, être la énième galerie à exposer Jonathan Meese ne présente pas d’intérêt, par contre profiter de la visite de ses collectionneurs allemands pour imposer quelques artistes français serait lancer une belle offensive outre-Rhin, non ? Mais le « chauvinisme » de nos jours pèse bien peu de chose au regard du résultat financier. Heureusement en France, une prise de conscience est en marche et fait naître des initiatives audacieuses et engagées comme celle de Julie Crenn, nouvellement nommée directrice artistique de la foire Slick, qui a décidé de mettre cet événement sous le signe de la création 100% française. L’espoir est donc donné de pouvoir crier « cocorico » à tue-tête en octobre prochain!
En attendant, sur ART COLOGNE pour trouver un peu plus de mixité « artistique » et de nouveauté, il faut se rendre au troisième étage où sont regroupées les plus jeunes galeries. Là, même certaines galeries berlinoises, comme CHERT, s’offrent le luxe d’un stand 100% artistes étrangers ! Une galerie allemande sans artiste allemand sur son stand à ART COLOGNE, cherchez l’erreur ? Qui plus est, une galerie où l’on pouvait croiser le soir du vernissage un couple de collectionneurs français, Isabelle et Fabrice de Pontfachre en train d’acheter des œuvres de Petrit Halilaj, on croit rêver !
Rares sont en effet les collectionneurs français sur cette foire principalement fréquentée par des collectionneurs allemands, suisses, autrichiens et belges. Passionnés, ils m’avouent avoir fait également l’acquisition de deux œuvres du jeune artiste bosniaque Radenko Milak (né en 1980) chez Priska Pasquer et être conquis par cette édition 2016. Aucun achat pour eux d’artistes allemands cependant, d’éternels coups de cœur pour Bernard Aubertin et Peter Buggenhout, et de belles découvertes comme Lauren Luloff, née en 1980 à Dover aux Etats-Unis, présentée sur la galerie luxembourgeoise Bernard Ceysson ou Zander Blom, né en 1982 en Afrique du Sud, dont quelques peintures ornaient le stand de la prestigieuse galerie allemande Hans Meyer.
Finalement, cette rencontre avec Isabelle et Fabrice de Pontfrache prouve que l’on peut sortir malgré tout du « scope allemand » sur ART COLOGNE pour faire quelques autres explorations internationales.
Là est le savant équilibre entre national et international qui caractérise cette foire « modèle ».
ART COLOGNE
DU 14 AVRIL AU 17 AVRIL 2016
KOELNMESSE, Cologne, halls 11
Un album de photographies sur la foire est disponible sur la page facebook du site Followartwithme. page facebook
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